Abandon de poste et présomption de démission, c'est validé sous réserves...
Le Conseil d’État valide la présomption de démission en cas d’abandon de poste, mais impose une garantie supplémentaire
Le 18 décembre 2024, le Conseil d’État s’est prononcé sur le décret d’application de la présomption de démission en cas d’abandon de poste, après avoir été saisi d’une demande d’annulation par, entre autres, plusieurs syndicats. Si le juge administratif valide le décret, il impose une exigence nouvelle non prévue par le texte, visant à garantir l’information du salarié sur les conséquences de son absence de reprise du travail sans motif légitime
La procédure de présomption de démission en cas d’abandon de poste fixée par le décret du 17 avril 2023 prévoit plusieurs garanties.
1. L’employeur doit adresser au salarié qui a abandonné son poste une mise en demeure, par lettre recommandée ou remise en main propre contre décharge, de justifier son absence et de reprendre son poste dans un délai qu’il détermine (sur le délai voir ci-après) (c. trav. art. R. 1237-13, al. 1).
Selon le Conseil d’État, cette mise en demeure « a pour objet de s’assurer du caractère volontaire de l’abandon de poste du salarié, en lui permettant de justifier son absence ou de reprendre le travail dans le délai fixé par l’employeur ».
Or, le Conseil d’État considère que, « pour que la démission du salarié puisse être présumée […], ce dernier doit nécessairement être informé, lors de la mise en demeure, des conséquences pouvant résulter de l’absence de reprise du travail sauf motif légitime justifiant son absence ».
Il ajoute donc une exigence supplémentaire à respecter par l’employeur qui entend faire jouer la présomption de démission.
Celui-ci devra donc désormais mentionner dans la mise en demeure qu’il adresse au salarié le fait, qu’à défaut de reprise du travail dans le délai imparti ou de motifs légitimes, il sera considéré comme ayant démissionné de son poste.
À défaut de comporter cette mention, la démission du salarié ne pourra pas être présumée.
Selon le juge administratif, il s’agit de transposer aux salariés du privé une exigence prévue dans la procédure d’abandon de poste applicable à la fonction publique. Il ajoute que la seule circonstance que le décret du 17 avril 2023 ne comporte pas cette exigence ne le rend pas pour autant illégal.
Remarque : comme l'a soulevé le rapporteur public, « le nouvel article R. 1237-13 du code du travail créé par le décret attaqué ne le prévoit pas explicitement mais cette précision découle [...] nécessairement de l’économie générale du mécanisme de présomption de démission. Il y aurait en effet peu de sens à prévoir l’envoi d’une mise en demeure qui ne préciserait pas à son destinataire ce qu’il encourt s’il ne justifie pas son absence ou refuse de reprendre le travail dans le délai imparti par celle-ci ». Celui-ci préconisait au Conseil d'État de préciser cette obligation d'information du salarié dans sa décision « pour éviter toute ambiguïté sur le contenu de la mise en demeure en question et la naissance de contentieux artificiels sur ce point devant le juge judiciaire » (conclusions, point 3.7).
2. Le délai imparti au salarié pour justifier son absence et reprendre son poste, fixé par l’employeur dans la mise en demeure, doit être d’au moins 15 jours, ce délai démarrant à compter de la date de présentation de la mise en demeure (c. trav. art. R. 1237-13, al. 3).
Le Conseil d’État valide ces dispositions, et en particulier le fait que le délai minimum de 15 jours court à partir de la date de présentation de la mise en demeure et non à compter de sa réception.
Pour le juge administratif, « le décret fixe pour ce délai minimum une durée et un point de départ clairs, qui ne sont ni contraires à la loi ni manifestement erronés ».
CE 18 décembre 2024, n° 473640 et s
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